Étrange texte, il est sorti comme ça, hier. Je l'ai laissé venir. Aujourd'hui l'humeur est plus terne, la fatigue chronique de retour...
Étrange que je dise "merci". D'habitude un merci s'adresse à quelqu'un, or je ne crois pas en dieu. Qui suis-je pour croire qu'il y a une nature supérieure au-dessus de ce monde?
Merci pour 2020, malgré tout...
Merci pour la récupération de mon auriculaire, après 3 mois de port d'une attelle et un premier échec.
Merci pour avoir été déclaré mort le 17 mars, ça m'aura permis de faire le point sur mon rapport à la faucheuse. Je m'en sentais assez détaché, sans en être sûr. Et quand il s'est agit de "moi", je n'ai pas été malmené intérieurement plus que ça. Cela m'a certainement aidé pour la suite.
Merci de nous avoir fait découvrir Paris ultra calme, sans auto, sans cri, sans passant, et un printemps qui n'en était que plus beau, floraison des glycines, chant des merles et autres, robiniers (acacias) en fleurs odorantes... Découverte de l'espace public libre...
Merci de m'avoir fait découvrir The Shift Project, une association portée par Jean-Marc Jancovici, qui a ouvert l'avenir sur un possible beaucoup moins collapsologue. Sans faux-semblant. Une approche pragmatique de ce qu'il FAUT faire pour réduire notre enfer futur. Regarder cet avenir droit dans les yeux, plutôt que d'en rester à un très sombre imaginaire. Deviner un peu le sentier est bien plus propice à le défricher, que de tout redouter dans l'obscurité.
Merci que le cancer de papa ait été du pancréas. Ainsi, nous savons que l'issue était incontournable. Le Covid n'y est pour rien. Et même avec des si, "si le covid n'avait pas été là", il n'aurait pas survécu. Il n'est pas un "dommage collatéral" de cette pandémie. Juste un déraillement de cette incroyable machinerie qu'est la vie. Une chose si "ordinaire", qu'elle en est plus supportable.
Merci de ne pas avoir été seul (alors que je le suis si souvent) quand maman m'a appris la mort de papa. Merci d'avoir été avec mes proches les plus proches. Une chaleur qui me connait très bien, moi et mes failles, était là. La présence de ma filleule de 16 ans m'a très certainement aidé à répondre à maman, à lui dire ce que je pouvais...
Merci pour deux petits apéros au boulots, où mon directeur relatait le moment où la brigadière lui apprend au téléphone que M. [capcap] est mort. Où j'ai été au centre de la discussion, ce qui n'a pas été le cas depuis 2012 et le GRR. Je suis un peu transparent, pas de mariage, pas d'enfant, pas d'éclat de voix... Je ne tiens pas à être le Centre du Motif (comme disait
Anne Sylvestre dans une chanson que j'aime) mais malgré tout, une fois de temps en temps, ça ré-insère dans la société.
Merci pour la fin des cadeaux de Noël, fête consumériste et obligatoire qu'on devrait abolir, au profit de petites fêtes plus familiales et réparties dans l'année.
Merci pour ces réflexions sur l'après qui ont germé un peu partout, l'après Covid, la réforme ou la révolution de la société... Même si presque tout s'est évaporé avec le déconfinement estival et qu'on ne parle guère plus que de vaccin pour revivre comme avant et d'impensable croissance pour rembourser nos centaines de milliards de nouvelle dette, sur 60 ans...
Merci pour cette famille où les choses se sont réparties naturellement, sans heurt, et pour mon rôle de proximité avec maman, où je passe de bons moments avec elle, dans une complicité croissante.
Merci pour avoir récupéré de l'endurance et avoir fait ces deux itinérances en rando-course, l'une cet été en Queyras, l'autre cet automne sur le sentier côtier breton, deux somptueuses parenthèses.
Merci à Daniel Cordier pour son
témoignage sur la vie et la solitude, qui montre avec force et humilié un chemin de vie atypique.
Merci à Pierre Larrouturou pour sa grève de la faim exigeant de financement de la dette et de la transition environnementale par la taxation des transactions financières.
Merci pour le fait que des objets aussi simples que des masques permettent de réduire de 90% la contagiosité du covid
Et ce soir, merci pour avoir retrouvé le chemin vers papa, en méditant. Un peu douloureux, mais sans doute nécessaire, 4 mois après notre dernière entrevue. Je regarde souvent cette photo des deux anges, sculptures naïves de l'église de Mont-Dauphin, qui me font penser à lui.
Mais les séances mensuelles et les retraites de méditation me manquent, je ne suis pas bien autonome... Pour 2021, je souhaiterais retrouver le
sangha !
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